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Les fondements des psychothérapies

 

 

 

 

 

 

Gonzague MASQUELIER

 

Les psychothérapies représentent un véritable phénomène de société.

Tout ce qui tourne autour de la psychothérapie est vécu par le public comme intriguant et intimidant, tout en suscitant des attirances ou des rejets souvent passionnels.

 

Comment se repérer dans la "jungle" de toutes les formes de thérapie, comment trouver la formule qui conviendrait à telle personne ou tel trouble, sont les questions qui nous sont le plus souvent posées, à nous les "psy".

 

Au lieu d’entrer dans une étude, qui ne pourrait d’ailleurs être exhaustive, des différentes familles de psychothérapie, il me semble plus utile de préciser quels sont les fondements indispensables et communs à toutes formes de psychothérapie.

 

Définissons d’abord la psychothérapie comme "le traitement de troubles psychiques ou psychosomatiques par des moyens psychologiques précis"

et abordons dans cet article la question des "Fondements de la psychothérapie".

 

Il me semble que toutes les variantes de la psychothérapie ont besoin d’un étayage théorique et pratique sur quatre points :

un soubassement philosophique, une focalisation sur la relation, une conception de la psychopathologie et un cadre d’intervention.

 

J’illustrerai ces quatre thèmes par les réponses que j’ai trouvées dans ma propre pratique, la Gestalt-thérapie, non pas pour les mettre en exergue, mais plutôt pour inviter chacun à trouver les siennes propres.

 

1) Un soubassement philosophique.

 

La psychologie s’est séparée récemment de la philosophie, et la psychothérapie en est une des applications concrètes.

Le postulat de départ, commun à toutes les psychothérapies, me semble être la capacité d’évolution de l’être humain.

Si l’homme était prédestiné, s’il était uniquement conditionné par son instinct, ses gènes ou son histoire familiale, alors pourquoi investir tant d’énergie pour l’aider à sortir de ses névroses ?

 

Qu’ils croient à la puissance de l’inconscient (psychanalyse) ou à la rigidité des comportements acquis (comportementalisme), qu’ils attribuent une importance majeure à l’environnement (thérapie familiale et systémique), qu’ils insistent sur l’unicité de chaque individu (thérapie humaniste) ou qu’ils travaillent à libérer les émotions (thérapies corporelles ou émotionnelles), tous les psychothérapeutes partagent un postulat, celui de la possibilité d’évolution de l’homme.

 

En Gestalt-thérapie, nous donnons beaucoup d’importance à "l’ici et maintenant" : je ne suis pas conditionné à vie par ce que j’ai vécu dans mon enfance.

Cette conception de l’homme est illustrée par une affirmation de Sartre : "L’essentiel n’est pas ce qu’on a fait de l’homme, mais ce qu’il fait de ce qu’on a fait de lui ". L’homme recherche en permanence les conditions de son équilibre.

La thérapie est donc l’occasion d’élargir son "éventail des possibles", afin de développer "son ajustement créateur".

L’objectif est de restaurer la capacité de choisir. Le corollaire de ce postulat de la liberté, le "prix à payer" est le sentiment de responsabilité.

Se sentir responsable de ses actes, développer sa capacité de choisir, peut engendrer une montée d’angoisse.

 

2) Une focalisation sur la relation

 

Toutes les psychothérapies reposent sur la relation client-thérapeute, même si celle-ci peut prendre des formes très différentes selon les techniques

et les personnalités de chacun.

Pour qu’une psychothérapie soit "efficace", il faut qu’un lien puissant s’établisse entre "le psy" et son client.

L’alliance thérapeutique suppose que le client vive son thérapeute comme lui apportant de l’aide et du soutien (alliance affective), et que s’instaure un climat de coopération, c’est-à-dire que client et thérapeute aient le sentiment d’un travail en commun (alliance de travail), ce qui n’exclut pas la frustration.

 

Dans un livre publié en 1923, le philosophe Martin Buber oppose deux couples de mots, qu’il appelle des "mots principes", Je-Tu et Je-Cela,

et qui sont deux manières d’être au monde et surtout d’être en relation.

 

Je ne développe ici que ce qui concerne la relation d’aide :


- Le modèle médical nous propose une relation Je-Cela. Le médecin (Je) observe la maladie (Cela) qui se manifeste par des symptômes.

 Son art consiste à poser le bon diagnostic. Ensuite, rédiger l’ordonnance est facile, du moins si le diagnostic est juste ; le médicament est alors chargé de combattre la maladie.

La seule responsabilité du malade est d’aller consulter, puis de suivre l’ordonnance. La médecine traditionnelle est bâtie sur ce modèle scientifique.

Le médicament et le "microbe" tiennent le devant de la scène.

 

- Dans la relation Je-Tu, deux êtres différents, un professionnel et un client, établissent un contact dialogal et c’est cette relation qui est soignante.

"Au commencement est la relation", écrit Buber.

 Le symptôme est alors considéré comme un langage, comme un appel, comme une difficulté de relation qui empêche la personne de développer tout son potentiel.

Et, comme l’affirme Buber, "Une fois passé le temps de la rencontre, l’homme n’en sort pas tel qu’il est entré".

 

La Gestalt est une thérapie dialogale et herméneutique.

Que veut dire ce dernier mot ?

 En grec ancien, il pourrait se traduire par "faire comprendre". Il a été utilisé dans l’Encyclopédie de Diderot (1747) pour désigner l’art de découvrir le sens exact d’un texte.

L’herméneutique moderne insiste sur l’idée que l’étude d’un même texte peut apporter une multiplicité de sens et d’interprétations : c’est la polysémie.

 

La Gestalt-thérapie est herméneutique et polysémique, car elle ne prétend pas donner une interprétation unique à un événement.

Nous revenons aux apports de Martin Buber : il n’y a pas un professionnel chargé de donner du sens aux matériaux apportés par le client.

C’est de la recherche dialogale que va surgir lentement la figure, c’est-à-dire la signification de ce que le client travaille en thérapie.

En début de séance, cette forme est cachée aux deux partenaires.

 

3) Une conception de la psychopathologie

 

Pour comparer les différentes manières d’aborder la psychopathologie, nous devons d’abord nous interroger sur la notion de bonne santé.

Pour l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) : "La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité". Il y a, me semble-t-il, trois manières de concevoir la "mauvaise santé" en psychothérapie : notre regard peut être porté sur l’intra-psychique, sur l’inter-psychique ou sur le champ.

 

Dans une conception intra-psychique, je postule que la source de la difficulté est inscrite dans le psychisme de mon patient.

Je vais pouvoir identifier une névrose, un mécanisme de défense, emprunter la "voie royale" vers l’inconscient que sont les rêves ou les lapsus. _

Dans une conception inter-psychique de la psychopathologie, je vais m’intéresser aux perturbations de la relation avec les autres.

En thérapie familiale, on parle par exemple de "l’enfant symptôme", qui sert de bouc émissaire dans un fonctionnement familial perturbé.

 

Il existe une troisième vision de la psychopathologie, qui fait référence à la théorie du champ. Kurt Lewin définit le champ psychologique comme l’ensemble des données conscientes ou inconscientes qui influencent une conduite.

Ces faits peuvent être sociologiques, physiques, éducationnels, etc.

 

Pendant sa psychothérapie, principalement centrée sur sa vie de couple, Paul prend la décision de rompre.

Mais après quelques semaines de séparation, il décide de renouer avec sa compagne, puis se sépare à nouveau, et recommence plusieurs fois ces "navettes", qui le perturbent beaucoup, ainsi que ses proches.

 

Ces changements de cap répétés peuvent s’étudier comme un conflit interne entre les désirs de Paul et ce qu’il décide (intra-psychique), comme une dynamique de la relation entre lui et sa partenaire (inter-psychique) ou comme la recherche d’équilibre entre des tensions antagonistes (théorie du champ parmi  ces tensions, Paul identifie peu à peu des désirs d’indépendance, une éducation moralisante, la peur de vivre seul, la crainte de décevoir son psychothérapeute dont il imagine qu’il aurait un projet sur lui, etc.

C’est la mise en lumière de toutes ces tensions qui lui fait découvrir où se niche son véritable désir.

 

On peut alors définir la psychopathologie comme une rupture d’équilibre, une perturbation des échanges entre un organisme et son environnement. L’accent est mis sur la perception subjective, phénoménologique, de ces échanges ; le thérapeute et son client peuvent avoir une perception très différente de ce qui se joue "ici et maintenant".

Cette approche est passionnante car elle permet de lutter contre la "fixité" de la personnalité ou de la psychopathologie.


La Gestalt-thérapie nous a fait passer de l’ère de la photographie à l’ère du cinéma.

 Je veux signifier par là qu’elle s’intéresse au "processus", à l’ajustement permanent entre un organisme et son environnement.

 Cet ajustement est par définition en perpétuel changement. Il n’est pas possible de fixer ce contact, comme une photo pourrait fixer une expression, une mimique.

Le Gestaltiste parle de cycle de contact, d’ajustement créateur, de forme qui émerge du fond, autant de termes qui évoquent le mouvement, le cinéma, le théâtre.

 

4) Un cadre d’intervention

 

Je ne peux développer dans ce bref article les multiples axes de travail utilisés par les différents courants de psychothérapie.

Certains s’appuient sur le transfert, d’autres le négligent. Certains utilisent majoritairement le mode verbal, d’autres lui ajoutent les approches corporelles et émotionnelles ou valorisent la créativité artistique.

 

Mais tous les psychothérapeutes ont besoin d’un cadre de travail précis, composé du "protocole de la cure", d’une déontologie, d’une éthique et d’une supervision.

 

- Le protocole précise l’organisation pratique de la psychothérapie (horaires, tarifs, modalités par rapport aux séances manquées, aux vacances, etc.).

 Il s’agit d’une forme de contrat, tacite ou parfois écrit, qui organise le travail.

 

- La déontologie concerne un corps de métier : nous sommes donc liés à la fois par la déontologie des psychothérapeutes (exigence d’une thérapie personnelle approfondie, règles d’abstinence, secret professionnel, etc.) telle qu’elle est formulée par les associations , fédérations ou syndicats professionnels, et par la déontologie propre à l’école de pensée à laquelle nous nous référons.

 

- L’éthique est définie par Robert Misrahi comme "le choix de la moins mauvaise solution possible". Nous sommes parfois placés devant un choix "cornélien", qui nous place dans un conflit de valeurs : si je constate que mon client est dans une crise suicidaire, dois-je le protéger de ses pulsions, même malgré lui ? Si j’ai un client incestueux, dois-je protéger l’enfant avant tout et lever le secret professionnel, comme m’y oblige la Loi française ;

 mais alors, que devient l’alliance thérapeutique ?

 Il n’y a jamais de réponse binaire ("il faut, tu dois, il n’y a qu’à !") à ces questions, mais une interrogation qui laisse parfois le thérapeute face à un choix déchirant qu’il devra assumer.

 

- La supervision permet au psychothérapeute de s’interroger sur sa pratique, de questionner le lien qui le relie à son patient.

 

Cette supervision peut explorer trois domaines :


- le domaine technique : dans telle situation, qu’aurais-je du ou pu faire ? Quels concepts pourraient m’être utiles ?

 

- le domaine de la psychopathologie : quels sont les symptômes développés par mon client, que se passe-t-il dans la séance ?

 

- le domaine contre-transférentiel : que vient-il réveiller chez moi ? Quels sont les éléments de mon histoire qui se rejouent dans la relation "ici et maintenant" avec mon client ?

 

En Gestalt, ces deux derniers points sont particulièrement liés.

En effet, si nous nous appuyons sur une conception de la psychopathologie en lien avec la théorie du champ, alors le travail de supervision contre-transférentiel est fondamental. La pathologie de mon client entre en résonance avec la mienne.

Je ne peux le faire travailler qu’en étant le plus conscient possible de ce qui est en train de se jouer pour moi.

 

Un métier en constante évolution

 

Pour terminer ces quelques réflexions sur les fondements de la psychothérapie, je voudrais redire à quel point notre métier est au carrefour de disciplines différentes.

Si la philosophie, la psychologie et la sociologie sont traditionnellement vécues comme des "cousines germaines" fréquentables, chez qui nous pouvons nous ressourcer régulièrement, je pense que nous ne fréquentons pas assez les chemins d’Esculape, je veux dire ceux de la médecine et des sciences de la vie.

 

Les travaux récents sur le cerveau et les connexions synaptiques , sur les hormones qui régulent l’humeur , ou sur les phéromones qui attisent notre désir , sur notre patrimoine génétique, bref tous ces travaux scientifiques me semblent une autre "voie royale" sur laquelle psychothérapeutes et scientifiques devraient davantage cheminer de concert…

 

GonzagueMASQUELIER Psychologue, psychothérapeute. Directeur de l’Ecole Parisienne de Gestalt (EPG).


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